Chroniques noires
Pendant des années, je m'étais débattu sans faiblir, au milieu de mes infortunes. J'étais le dernier né d'une famille pauvre. Nous vivions dans une misère infâme où il était difficile de détourner les yeux ; à peine lisait-on sur les journaux qui protégeaient nos murs déshabillés le nombre d’années qui s’écoulaient lentement ; dans un silence morne. À l’instar de beaucoup de ses frères, mon père trouvait du plaisir à noyer sa misère avec un grand nombre de gorgées de mahia, quand l’occasion s’en présentait. Cependant, il éprouvait à cet égard une telle crainte de ma mère, très pieuse, qu’il cachait les bouteilles dans nos cartables, habilement, dans une indifférence suprême. Mon père était alcoolique certes, mais pauvre. Oui, tellement pauvre. Ma mère était pauvre. Mes sœurs étaient pauvres. Mes oncles, étaient pauvres. Nos voisins étaient pauvres. Notre chat était pauvre. Autant de pauvreté me rendait presque riche. Riche au milieu de mes paires, d'une misère rouge