Elle




Me voici donc esseulée, maudissant les théories de mes amours, d'un pessimisme pointu. Peut-être Rouge, et à plein souffle. Les cheveux décoiffés, escamotaient mes lèvres pâlies, d'où jaillissait un mépris silencieux, de l'homme, les yeux fermés. Mutilée, mon cœur noirci, desséché à son tour par un chagrin âpre, s'arrêtait de battre, délicatement, paralysant ainsi mes membres, dont les veines internes, se dilataient d'un grand pas, vers les éternités. Des éternités exhortées d'un grand souffle, par une solitude démesurée, au milieu des morts, à quelques pas, des miens. Sans doute, des âmes égarées, au regard vide, croyant peut-être encore aux promesses d'une vie éternelle. Éternelle et joyeuse. N’ayant plus de mari. Aucun amant. N'ayant plus de chien, au dernier printemps. N'ayant plus de fils, de bien-aimé, de cortège que mes pensées, dans un vertige noir, où la lune s'en allait en guerre, éteindre les cieux, ornés de quelques étoiles....



J'ai souffert toute une vie. Ah cette vie ! Comme elle se leurrait, vomissant mes illusions d'une fumée noire. Comme elle se perdait, avec mes airs d'insouciance, si détachée du monde, habituée aux nuits passées devant mes livres, et ne songeant qu' à regagner les grâces des poètes damnés. Une seule chose, freinait mes humeurs d'un grand désastre, et de tous cotés, le mariage. C'était vrai, je câlinais promptement le temps, du haut de mes vingt-huit ans. Et ainsi, au milieu de cette poussée de tensions, le mariage se dressait comme une exploitation agricole, où l'on ne pouvait négocier les prix, mais où se cultivait les myrtilles du Canada, et le cacao de Madagascar. Salim, patron de mon beau-frère, toujours correcte, éduqué aux bonnes manières de la bourgeoisie, se confortait dans sa froideur trompeuse d'homme d'affaire, pour nous séduire, mes parents, mes sœurs, et moi. C'était un homme étrange, claustré sous la raideur de ses tristesses, la souffrance d'une nature ferme, agonisant en secret de s'être fait cocu dans un précédant ménage, avec une italienne dont je ne connaissais que le prénom. Rien ne pressait, en tout cas, pour moi. Le mariage, ce n'était pas que ça m'empêchait de dormir, mais mes parents poussaient si fort, devant ses ambitions de charmeur solitaire, qu' à la longue, je finis par céder, et par prendre Salim comme époux. Mes parents goutaient là une gaieté de plus, ils ne trouvaient rien de trop beau pour leur fille aînée, promise à un bel avenir, aux bras d'un homme, qui en apparence, était plus que parfait. Était-ce une existence joyeuse, que de passer ses journées à attendre un mari, lorsque celui-ci voyageait toute la semaine, jusqu'au jour, où ce dernier, se déciderait à me choyer d'un enfant, peut-être? Le marié, était bel homme, sans doute, le plus riche de sa génération. Le plus intelligent aussi. C'était avant tout, un compétiteur exalté, qui perdait le bon sens à satisfaire ses passions démesurées, et déboursait des sommes importantes, sans y songer, par des gestes de déraisons. N'est-ce pas, aux gestes furieux, un grand vide, sans doute important, à combler ? Et ce furent des marmonnements de joies, au milieu des nuages effarés, devant mon caftan blanc, la tête droite, pour honorer mes obligations de Madame M....            


Un dimanche, on vint à parler d'amour et de passion, la gêne croissante. Un grand débat se haussa, l'éternel débat pour savoir si l'on pouvait aimer qu'une fois, dans une vie, à la mort. Alors, comme un salaud, il évoqua le cas de ses amis divorcés, incapables d'aimer une seconde fois, jurant loyauté à leurs amours perdus ; mais aussi mon histoire, n'ayant aimé qu'une seule fois, à vingt-ans, d'une fièvre affable. Ma réponse, telle une fragrance toxique, empoissonnant l'air de son arôme, détraquait toute sa tête, dans un élan de démence, et cognait mes entités, à plus de mille hommes, en un seul. Une peuplade de rancune crevait en lui, une peuplade envenimée, gavée lentement à l'arsenic, et que je devais payer, seule, à présent. Des automnes, et des automnes de rancœurs rouges, le torturaient d'une boulimie de génocide, sur les femmes, toutes des putains, hurlait-il, par orgueil. Cela le rendait presque heureux. Chaque soir, lorsqu'il sentait que tout en moi le récusait, il me caressait sans même en tirer de plaisir, puis me frappait violemment, insistant avec brutalité, à un besoin de faire ça, à la fascination de sans cesse, m'humilier, comme ci je n’étais qu'une veille seringue, négligée. C'était une souffrance sans convalescence, ou du moins possible, où il demeurait provoquant, avec son mépris pour les femmes, sa volonté de posséder mes entités, en dehors des jouissances légitimes, profitant de ma lâcheté, pour me mépriser, me traitant en putain, me racontant qu'il avait eu pour maitresses des adolescentes, puis une femme, plus belle, plus fraiche, devant laquelle je serais honteuse de me montrer, publiquement. Salim se faisait grossier, tortionnaire, jusqu' à me fracasser en petites miettes, puis, s'occupant de me procurer ce dont j'avais besoin, pareil à un chien, qui ne méritait de manger, que lorsqu'il était obéissant, et soumis à son maitre. Une brute sans doute. Non, un psychopathe dans l'âme, qui me déchiquetait le visage, frémissant sous des caresses douces, pour y abreuver sa mélancolie, jusqu' à ne plus pouvoir s'oublier, pour finalement, m'interroger, comme à ses habitudes "Tu me trompes, n'est ce pas ? Je sais que tu me trompes . C'est demain que je vais te tuer....si tu me trompes " . A ces heurts fréquents, les mains sur la chair, je cherchais à m'étrangler, pour m'affranchir de ses démences, par la lueur des ténèbres, par les flammes des olympes, à jamais, et pour toujours....





J'ai été mariée par convenance, puis rejetée, tyrannisée, trompée sans cesse, dans le grand silence, par un homme malade, que rien désormais, ne pouvait soigner. Toujours se soumettre devant les abaissements jusqu' à ne plus exister, pour rester mariée, n'était-ce pas un divertissement toxique, que nous imposait la société, et qui ne pouvait durer d'avantage ? Qu’ai-je encore à craindre finalement de cet homme, puisque tout le mal est fait ? Ne pouvant plus corrompre mes amertumes, il ne saurait plus éveiller mes larmes à nouveau. L’anxiété, la perversion, sont deux souffrances, dont il m’a, à jamais affranchie. Sans doute, il était convaincu, de m'avoir fait assez de mal, pour s'en souvenir toute une vie, et ainsi me marquer, telle une bête de cirque, si indigente, et si aveuglée par la foule. Mais quelle vie, plaisante, allait venir, après l'avoir épousé ? Des coups de ceinture, debout, du sang giclé de partout, des insultes de bas étage, des infidélités à ne plus les compter, et une multitude d'ecchymoses, qui me tiraient vers le fond, pour tomber encore plus bas, aux quatre coins des saisons. De haut, en bas, il croyait se venger de moi, comme de toutes ses partenaires, sous les airs limpides du crépuscule. Sous les étoiles rayonnantes, de toutes parts, des graines s'enflaient, des germes poussaient sous la terre, et des embryons se délivraient à jamais, de cette existence piètre, et galvaudée, au scalpel de mon désespoir. Quand je pense qu'il a provoqué la mort de notre enfant, mort-né, par ses coups violents, et qu'il a souffert, transpirant la doléance, ce que j'ai souffert, auprès de lui, à la perte de cet enfant, je ne peux que sourire aux anges, dans un demi-vertige sournois, avec la pensée qu'une minute de plus allait être la mort, pour son fils, mon fils, s'il avait vécu, avec pareil homme. Toute espérance de vie, de bonheur, et de pardon, s'en est allée, avec Salim. Et, il n'y eut rien, plus rien entre nous, rien que la masse d'un corps nu, s'habituant aux gifles, dépouillé de toute forme de vie, brisé d'impuissance, à la perte de sa dignité, de sa maternité, de ses essences, de sa philosophie, et de son cœur. Je ne songe désormais qu'à valser avec la mort, et y noyer mon essence, subtilement, jusqu'à l'anhélation...à jamais et pour toujours


J'ai rêvé d'elle, et nous nous pardonnions Non pas nos torts, il n'en est en amour, Mais l'absolu de nos opinions Et que la vie ait pour nous pris ce tour.

Paul Verlaine
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J'ai rêvé d'elle, et nous nous pardonnions Non pas nos torts, il n'en est en amour, Mais l'absolu de nos opinions Et que la vie ait pour nous pris ce tour.

Paul Verlaine
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J'ai rêvé d'elle, et nous nous pardonnions. Non pas nos torts, il n'en est en amour, Mais l'absolu de nos opinions. Et que la vie ait pour nous pris ce tour. Paul Verlaine 
A la mémoire des anges...
 
J'ai rêvé d'elle, et nous nous pardonnions Non pas nos torts, il n'en est en amour, Mais l'absolu de nos opinions Et que la vie ait pour nous pris ce tour.

Paul Verlaine
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